LETTRE DE NOËL 2025 – Rencontrer Jésus dans une communauté de pauvres

« C’est le mystère de Noël qui m’a converti » raconte le Père Chevrier
C’est pourquoi cette fête est d’une grande importance dans la tradition pradosienne. 

Les pères Diego MARTÍN PEÑAS (Responsable général), Luc LALIRE (1er assistant) et Joseph NIKIEMA (2ème assistant) partagent avec vous la lettre de Noël 2025 adressée à tous les pradosiens du monde entier.

La lettre est proposée en françaisespagnolitalienportugaisanglaismalgachearabe et prochainement en coréen. Pour la télécharger, cliquez sur le lien ou sur le visuel correspondant ci-dessous.  

Bonne lecture et n’hésitez pas à partager le message des permanents du Prado Général avec vos proches et amis.


RENCONTRER JÉSUS DANS UNE COMMUNAUTÉ DE PAUVRES

« Ils se hâtèrent et découvrirent Marie et Joseph,
avec le nouveau-né couché dans la mangeoire » (Lc 2,16)

 

À l’occasion de la célébration du mystère de Noël, je vous propose de méditer ce verset de l’Évangile qui nous raconte comment un groupe de bergers, des personnes marginalisées et de moralité douteuse, rencontrent une petite communauté de pauvres qui va changer leur vie pour toujours. Je vous invite également à regarder notre propre famille pradosienne dans ses différentes institutions, communautés et équipes. Nous sommes appelés aujourd’hui à être comme cette communauté réunie dans l’étable, avec les portes ouvertes « aux quatre vents », pour accueillir les pauvres que Dieu met sur notre chemin et construire avec eux le Royaume.

Cette petite communauté de pauvres est composée de Jésus, Marie et Joseph et d’un petit groupe indéterminé de personnes qui, selon le récit évangélique, s’émerveillaient de ce que disaient les bergers. Luc est un narrateur qui cherche à interagir avec le lecteur et, c’est sans doute pour cette raison qu’il place à côté de la Sainte Famille ces nouveaux venus dont nous ne connaissons que l’existence. Chacun de nous peut être l’un de ceux qui se trouvent dans l’étable devant Jésus, le Verbe incarné, faisant partie de cette première communauté. Le père Chevrier avait également le désir d’occuper l’une de ces places d’honneur dans l’étable. Après avoir célébré l’Épiphanie dans la chapelle Sixtine, il nous raconte ce que son cœur désirait vraiment : « J’aurais préféré voir la crèche du bon Jésus et être berger, pour avoir le bonheur d’être dans l’étable du bon Sauveur » (Lettre 15).

Cette petite communauté de pauvres se rassemble autour de Jésus. Il est le centre et la raison pour laquelle cette fraternité de l’étable s’est réunie. Jésus est une sorte d’aimant qui attire les uns et les autres. La fragilité d’un petit enfant dépendant, radicalement et « ontologiquement » pauvre, selon les mots du P. Ancel, attire la présence d’autres pauvres qui découvrent en lui les richesses du Verbe incarné du Père : son immense et irrévocable amour pour l’humanité. « Ô mystère ineffable! Dieu est avec nous, Dieu est venu nous parler, il est venu vivre avec nous pour nous parler et nous instruire » (VD 62). C’est la première tâche de l’équipe, de la communauté pradosienne: permettre à Jésus-Christ d’occuper le centre de notre vie afin que les pauvres que le Seigneur nous envoie puissent également le découvrir en nous.

Cette petite communauté de pauvres s’enrichit d’autres membres qui ont été choisis et envoyés par le Père. Les bergers se rendent à l’étable parce que Dieu, par l’intermédiaire de son ange, leur a révélé l’événement qui s’est produit. Obéissants à la Parole, ils ont laissé leur troupeau dans les champs et se sont précipités à Bethléem. Ils n’ont pas pris l’initiative, ils ont seulement écouté et obéi à ce qui leur a été dit. En eux se réalise la Parole que Jésus proclamera à Capharnaüm : « Personne ne peut venir à moi si le Père qui m’a envoyé ne l’attire » (Jn 6, 44). Le Père continue d’envoyer des pauvres dans les communautés de son Église, parmi lesquelles se trouve le Prado. Il place les pauvres près de nous afin que nous leur montrions son Fils. Chacun sait qui sont ces personnes en situation de précarité. Dans la ville de Lyon, la présence d’immigrants qui survivent avec un minimum de dignité dans des tentes est chaque jour plus visible. À moins de deux cents mètres de la chapelle du Prado, nous avons deux de ces campements de pauvres. Nous les trouvons dans chaque village et chaque ville, car les pauvres seront toujours parmi nous. Cette communauté de Bethléem encourage l’ensemble du Prado à ne pas détourner notre regard des pauvres et à découvrir que c’est Dieu lui-même qui les amène dans notre Église.

Cette petite communauté de pauvres vit la pauvreté d’esprit, l’humilité, qui l’amène à reconnaître la présence du Verbe de Dieu et à l’adorer en silence. Le récit de Luc ne nous transmet pas aucunes paroles des personnes qui se sont réunies dans l’étable. Devant la Parole définitive incarnée du Père, tout autre mot est superflu, il dérange. Devant le mystère qui se présente à leurs yeux, seul le silence adorateur
est possible. Telle fut l’expérience qui transforma la vie du père Chevrier. La contemplation silencieuse de celui qui est la Parole incarnée l’amena à le laisser s’incarner dans sa vie et à se placer au milieu des pauvres pour construire avec eux la nouvelle famille de Jésus : « Un Dieu devient enfant. Dieu, par amour, se rend vivable. Il nous appartient. Il nous est donné. Il vient former un nouveau peuple de véritables adorateurs, de frères » (Sermon de Noël 1857).

Cette petite communauté se réunit dans une étable et non dans l’auberge de la ville. Le Père a choisi cet endroit pour la naissance de son Fils. Le Pauvre naît dans des conditions de pauvreté et ceux qui sont à ses côtés partagent ces conditions. Le lieu où la communauté se réunit, les moyens dont elle dispose, peuvent parler de la pauvreté que nous sommes appelés à vivre et faciliter l’accueil des pauvres qui
arrivent : « Nous devons porter cet esprit de pauvreté et de simplicité et nous contenter du nécessaire jusque dans nos églises et dans les objets du culte. Il ne faut rien dans nos églises et dans nos ornements qui excite la curiosité ou la jalousie des fidèles. […] Mettez un prêtre saint dans une église de bois, ouverte à tous les vents, il attirera et convertira plus de monde dans son église de bois qu’un autre prêtre dans une église d’or » (VD 297). Le pape Léon XIV souligne cette idée, citant saint Jean Chrysostome, dans sa récente exhortation apostolique : « Dieu n’a pas besoin d’objets en or, mais d’âmes en or » (Dilexi Te, 41).

Cette petite communauté pauvre se laisse enseigner par les pauvres qui viennent à elle. Les bergers frissonnent en entrant dans l’étable et en trouvant au centre Jésus, les personnes rassemblées en attitude d’adoration et des conditions de pauvreté qui ne leur sont pas étrangères. Ils se sentent chez eux et c’est pourquoi, en toute confiance, ce sont eux qui prennent la parole. Leur expérience confirme ce que l’ange leur avait dit de l’enfant et ils ressentent le besoin de le raconter. Ce sont eux qui évangélisent ceux qui les accueillent. Leurs paroles suscitent l’admiration de tous ceux qui les écoutent, en particulier de Marie, qui était capable d’écouter avec son cœur. Comme il est important aujourd’hui d’écouter avec admiration et accueil les paroles des pauvres ! Les pauvres nous parlent de Jésus par leur propre vie, en eux nous trouvons l’Évangile vécu. Ils sont pour nous des témoins et des maîtres de la foi :  « Nous sommes témoins de leur capacité à prendre des responsabilités dans le monde et dans l’Église. Ensemble, nous nourrissons notre espérance des signes de l’Esprit que nous percevons dans leur vie. C’est l’Évangile que nous voulons partager avec eux » (Constitutions 44).

Mes amis, notre famille pradosienne est appelée aujourd’hui à être comme cette fraternité réunie dans l’étable. Nous sommes sur le point de commencer la célébration du bicentenaire de la naissance du Père Chevrier et, pour la célébrer dans le même esprit évangélique que l’Apôtre de la Guillotière, nous devons renouveler le charisme reçu et ouvrir nos cœurs et les portes de nos maisons à Jésus qui vient à nous dans la vie des pauvres. Que le Seigneur nous accorde d’être le canal de sa grâce afin que, parmi nous, les pauvres et ceux qui souffrent puissent vivre le même processus humain et croyant que les bergers ont vécu dans cette petite et pauvre communauté de Bethléem.

Lyon, le 01/12/2025

Pères Diego MARTÍN PEÑAS (Responsable général), 
Luc LALIRE (1er assistant) et Joseph NIKIEMA (2ème assistant).